Aller au contenu principal

Chômeur, fraudeur, la rime riche

Nico Cué

C’est un petit matin blême, dans ces cas-là ils sont tous blêmes. La sonnette résonne. Jeanne (prénom d’emprunt) quitte sa petite table de cuisine, sa tartine, son café fumant et les corn-flakes du gamin qui traînent dans la salle de bain. Elle répond à ce « dring-dring » aussi impératif qu’inattendu. Derrière la porte qui vient de s’ouvrir, un monsieur propre sur lui, comme on dit. Peut-être un peu gêné, allez savoir.

Edito de Nico Cué

(siehe Deutsche Fassung unten)

« Bonjour Madame. Je viens de l’ONEm. Je sais que vous êtes chômeuse. Vous avez déclaré vivre seule avec votre fils. Mais nous nous pensons que vous vivez aussi avec Jacques X, lui aussi chômeur. Si c’est le cas, votre situation est irrégulière, puisque vous nous avez déclaré vivre seule. Nous avons remarqué que vous consommez plus de gaz et d’électricité qu’une personne seule avec un enfant ne le fait normalement. Je vais donc entrer chez vous pour contrôler. »

Et le Monsieur propre sur lui, peut-être pas très fier de ce qu’il fait (allez savoir), de commencer à inspecter la chambre, la salle de bain d’où le gamin est sorti éberlué, les armoires…, les choses de la vie, les choses à soi. Jeanne, chômeuse, pleure doucement devant sa vie mise à nu. Il y a un an et demi, elle a perdu son job de réassortisseuse sur une des lignes de la grande multinationale qui l’employait. Elle a couru de place en place, de petite annonce en petite annonce, de suggestion de l’ONEm en exigence de l’ONEm, pour trouver autre chose. A 45 ans ? Rien. « Madame, ce n’est pas possible ». Qu’est-ce qu’elle l’a entendu, ça. Elle a une vie amoureuse, Jeanne, c’est vrai. Ça ne me regarde pas. Ça ne nous regarde pas. Le chômage est si dur, lui faut-il la solitude ?

C’est du pathos, ça ? Hélas non… Depuis l’année 2000, les visites domiciliaires de ce type, visites qui ont toujours existé, devaient être précédées d’un avertissement préalable d’une dizaine de jours. Le chômeur suspecté ne pouvait pas être inquiété avant. C’est un vieux principe démocratique, celui-là qui veut que le suspect soit averti. Le criminel ne pourra voir débouler la police chez lui que si elle est munie d’un mandat de perquisition. Lequel est dûment délivré par un juge d’instruction qui, en principe, ne le fait pas à la légère et se fonde sur des éléments précis. Trop de kilowatts ? Ben l’Onem peut surgir, et fouiller dans l’intimité.

L’idée est celle de Bart Tommelein, chargé dans le gouvernement Michel de la lutte contre la fraude sociale. Ce n’est même pas un NV-A, il n’est que VLD… Et au moins il est franc : il faut supprimer les dix jours d’avertissement, dit-il en substance, parce que ces dix jours pourraient permettre au chômeur de dissimuler les traces de sa fraude…

Chômeur, fraudeur. Pour ce gouvernement, la rime est riche. Celui qui perd son emploi ne devient pas seulement un sans-emploi : on le considère a priori comme un profiteur, qui se complaît dans son statut d’assisté. Comme un fraudeur, donc, puisqu’il veut rester dans ce statut. Comme un paria. Comme un moins qu’un rien. Dommage peut-être qu’il soit belge, on pourrait lui offrir un billet pour Lampedusa.

On le cible. Mais on laissera la bande de SwissLeaks laisser s’évaporer 6 milliards d’euros aux six cents diables, soi-disant en toute légalité. On laissera les diamantaires anversois estimer eux-mêmes ce qu’ils devront, au bout du compte, payer au fisc.

La fraude, bien sûr, est inacceptable. Jamais la FGTB, dans son ensemble, n’a cautionné quelle que fraude que ce soit, qu’elle soit fiscale ou sociale. Mais les droits sociaux sont un droit individuel. Chacun doit pouvoir avoir le même accès aux prestations de sécurité sociale quelle que soit la façon dont il construit sa vie, seul ou en couple. Qu’est-ce que c’est que cette notion de cohabitant si ce n’est, au bout du compte, la (re)construction officielle de l’inégalité entre hommes et femmes ?

On pourrait se dire, c’est vrai, que le Tommelein est simplement en train de se construire une image d’homme dur, intransigeant, qui plaira à son électorat forcément de droite. Pour lui, un chômeur de plus, un chômeur de moins, c’est de toute façon hors de son électorat. Donc, rien, juste une statistique.

Mais ce n’est pas qu’un coup de pub sur le dos des plus faibles. Ce qu’il veut, ce n’est pas sa seule volonté, c’est celle du gouvernement tout entier, qui le soutient dans son projet. Pendant qu’ils chassent le petit gibier, le gros prospère. Ce qui les encombre, c’est le monde du travail, qu’ils ne veulent même pas voir.

Un exemple ? Vendredi 8 mai, Charles Michel est venu visiter une usine à Spa. Il y avait 50 travailleurs qui protestaient et voulaient le rencontrer et, pourquoi pas, dialoguer avec lui. Il a choisi d’entrer par une porte de service. Pourquoi se frotter à eux ? Travailleurs, chômeurs ? Michel et les siens ont fait une croix dessus

 

Nico Cué

Secrétaire général

 

Arbeitslose, Betrüger, das reimt sich gut zusammen

Bei Tagesanbruch, an einem blassen Morgen – in diesem Fall ist der Morgen immer grau, klingelt es an der Tür. Anja (Pseudonym) erhebt sich vom Küchentisch, verlässt ihr Brötchen, ihren duftenden Kaffee und die Cornflakes des Sohnemanns, der im Bad herumtrödelt. Sie öffnet auf Drängen der unerwarteten Klingel die Tür. Davor steht ein einwandfrei gekleideter Mann. Vielleicht ist er etwas verlegen, man weiß nie.

« Guten Morgen, ich bin vom LAAB. Ich weiß, dass Sie arbeitslos sind. Sie haben angegeben, dass Sie mit Ihrem Sohn allein leben.  Wir glauben jedoch, dass Sie auch mit Hans X zusammenleben, der ebenfalls erwerbslos ist. Wenn dies zutrifft, ist Ihre Lage irregulär, da Sie gemeldet haben, dass Sie allein leben. Wir haben festgestellt, dass Sie mehr Strom und Gas verbrauchen als eine normale alleinstehende Person mit Kind. Deshalb muss ich jetzt rein, um Sie einer Kontrolle zu unterziehen. »

Und der einwandfreie, vielleicht etwas verlegene Mann (man weiß ja nie) inspiziert zuerst das Schafzimmer und dann das Bad mit dem verblüfften Söhnchen, Schränke, Schubladen, … Dinge des alltäglichen Lebens, persönliche Sachen. Die arbeitslose Anja weint angesichts des groben Eingriffs in ihre Intimsphäre leise vor sich hin. Vor anderthalb Jahren verlor sie ihre Stelle am Montageband eines großen internationalen Konzerns. Sie hetzte von einem Ort zum anderen, las alle Kleinanzeigen und folgte allen Anregungen und Aufforderungen des LAAB, um etwas anderes zu finden. Mit 45 Jahren? Aussichtlos. « Nicht möglich ». Wie oft sie das gehört hat. Ja, Anja hat auch eine Beziehung. Aber das geht mich nichts an. Das geht niemanden etwas an. Arbeitslosigkeit ist schon hart genug, muss man sie unbedingt einsam ertragen?

Sie finden das übertrieben? Leider nicht… Seit dem Jahr 2000 mussten solche Hausbesuche, die es schon immer gegeben hat, etwa zehn Tage vorher angekündigt werden. Vorher durfte der/die verdächtigte Arbeitslose nicht belangt werden. Gemäß einem uralten demokratischen Grundsatz, dass verdächtige Personen über den Verdacht unterrichtet werden müssen. Hausdurchsuchungen bei Verbrechern können nicht spontan oder überstürzt, sondern nur mit einem Untersuchungsbefehl vorgenommen werden. Dieser wird vorschriftsmäßig, nach reiflicher Überlegung und aufgrund gezielter Tatbestände, durch den zuständigen Untersuchungsrichter ausgestellt. Zu viel Strom verbraucht? Das LAAB kann jederzeit aus dem Nichts auftauchen und in Privatsachen rumwühlen.

Die Idee hatte Bart Tommelein, der in der Michel-Regierung für die Bekämpfung von Sozialbetrug zuständig ist. Er ist noch nicht einmal bei der NV-A, sondern nur beim VLD… Zumindest ist er ehrlich: Ihm zufolge müssen die zehn Tage Vorankündigung glattweg abgeschafft werden, weil sie arbeitslosen Personen Zeit geben, die Spuren ihres Betrugs  zu verwischen…

Arbeitslose, Betrüger. Für diese Regierung reimt sich das zusammen. Wer seine Arbeit verliert, wird nicht nur arbeitslos, sondern genießt per se sein Dasein als Leistungsbezieher, von dem er kräftig profitiert. Wie ein Betrüger eben, der seinen Status endlos verlängern will. Wie ein Außenseiter. Wie ein Loser. Schade, dass es Belgier sind, sonst könnte man sie kostenlos nach Lampedusa abschieben.

Sie werden umzingelt. Gleichzeitig darf die SwissLeaks Gang mal eben sechs Milliarden Euro verschwinden lassen – ganz legal. Die Diamantenhändler in Antwerpen dürfen ihre Steuerbeträge in aller Ruhe selbst ausrechnen.

Betrug ist selbstverständlich inakzeptabel. Nie hat die FGTB Betrug – ob sozial oder steuerlich – gutgeheißen. Aber die Sozialrechte sind ein Individualrecht.  Jeder hat Anrecht auf gleichberechtigten Zugang zu den Leistungen der sozialen Sicherheit, egal wie er sein Leben gestaltet, allein oder in einer Beziehung. Der Begriff der sogenannten « Zusammenwohnenden » ist nichts anderes als die offizielle Wiederherstellung der Ungleichheit zwischen Mann und Frau.

Man könnte fast meinen, Tommelein versuche, sich als harter und entschlossener Mann zu profilieren, um seiner rechten Wählerschaft zu gefallen. Ein Arbeitsloser mehr oder weniger – was soll’s, die wählen ihn ohnehin nicht. Nur eine statistische Größe.

Aber es handelt sich keineswegs um einen PR-Coup auf Kosten der Schwächsten, sondern um das erklärte Ziel einer ganzen Regierung, die hinter seinem Vorhaben steht. Während Sie Jagd auf das Kleinvieh machen, blühen und gedeihen die großen Jagdtiere. Im Weg steht dabei nur die Arbeitswelt, vor der sie die Augen verschließen.  

Ein Beispiel ? Am Freitag den 8. Mai besuchte Charles Michel eine Fabrik in Spa. Dort erwarteten ihn 50 protestierende Beschäftigte, die ihn treffen und – warum nicht – mit ihm reden wollten. Er ist durch den Hintereingang verschwunden. Warum sich ihnen stellen? Beschäftigte, Arbeitslose? Michel und seine Reihen haben das Thema begraben.

 

Nico Cué

Generalsekretär