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Panama

Les métallos ont toujours eu un réseau propre de relations internationales. Dans le cas précis du Panama, le point de départ de notre démarche, c’est qu’on y constate un besoin criant d’unification des syndicats. Mais pour mener à bien ce genre de mission, on reçoit normalement un subside de la Coopération au Développement belge et européenne. Pour obtenir cette aide, certains critères doivent être respectés, dont celui de ne pas dépasser un certain niveau de PIB. Or, le Panama est juste au-dessus de cette limite. Ce pays a des ressources gigantesques : elles proviennent du canal et du fait que le Panama est un paradis fiscal. Donc, le PIB est élevé mais n’est pas redistribué entre les gens !

Pour des raisons historiques, les syndicats panaméens sont très nationalistes. Ils s’étaient unis contre la domination des USA. Mais le canal a été rétrocédé au pays en 2000 et le front commun a chuté pour cette raison. Or, depuis 2007, la manne d’argent tirée des activités du canal est réservée à son élargissement. Le niveau de vie des gens a fortement chuté pour cette raison.

Les organisations syndicales sont politisées de manière incroyable. On a donc dû leur expliquer que l’indépendance est une nécessité absolue dans le combat syndical. Il faut se détacher de ceux qui détiennent les rênes de l’Etat afin de devenir véritablement revendicatif. Le travail est immense, il n’y a pas de conventions collectives. Nous les avons également formés aux concepts clés de l’économie qui sont fondamentaux dans la négociation. Les syndicalistes ne maîtrisaient même pas la notion d’inflation. On leur a donné un outil d’analyse de l’économie et un lexique syndical. Il a fallu également leur expliquer comment un Etat fonctionne, comment on peut agir syndicalement pour changer un certain nombre de choses sur le plan social.

La MWB a créé la première école de cadres syndicaux. Par ailleurs, comme on l’a dit, les syndicalistes sont très nationalistes et refusent d’affilier les travailleurs étrangers. Mais pour faire du syndicalisme avec cette mentalité-là, autant arrêter tout de suite. On leur a expliqué pourquoi il fallait que ça change et ça va changer ! De plus, grâce à notre action, il y a eu la première grève privée de l’histoire du Panama. C’était dans une laiterie. C’est un petit exploit car la procédure pour pouvoir faire grève est très lourde : les employés sont convoqués un par un et doivent dire à un fonctionnaire de l’Etat dépêché sur place si, personnellement, ils sont en faveur ou pas de la grève, avec tous les risques de pression que cela comporte.

La démocratie d’un pays se mesure à son degré de liberté syndicale. En outre, au Panama, les gens ne perçoivent pas la différence entre gauche et droite. Pour eux, la gauche est mythique. C’est Lula, Chavez, Cuba. Aux élections, les Panaméens ont le choix entre voter pour la droite ou pour l’extrême droite. Nos formateurs leur ont expliqué ce que c’est qu’être de gauche en politique.

Sur place nous avons pu rencontrer les trois organisations syndicales : les communistes, Convergence syndicale et le syndicat des services publics. Nous avons fait le point sur la formation que le MWB dispense depuis deux ans. Pour la suite, il faudra qu’ils élaborent dans un cadre unifié un véritable projet syndical. L’objectif final consiste en l’organisation régulière de congrès avec présentation de manifestes communs.